vendredi 12 octobre 2007

Sarkozy veut supprimer le référendum sur la Turquie !

SI SARKOZY a feint pendant sa campagne présidentielle d'endosser certaines thématiques du Front national, adoptant quelques slogans et formules lepénistes, il s'est en revanche bien gardé de reprendre à son compte la proposition frontiste de développer l'usage du référendum et d'en étendre le champ d'application. Pour un homme qui fait volontiers dans le populisme, mélange de Tapie et de Berlusconi, cette omission est tout sauf l'effet du hasard. En valet du mondialisme, Sarkozy sait bien qu'il est beaucoup plus prudent de faire entériner les réformes par la voie parlementaire, avec des godillots votant comme un seul homme selon la consigne du parti, que par la voie référendaire.

VERS L'ABROGATION DE L'ARTICLE VOULU PAR CHIRAC

Déjà, le 20 novembre 2003, dans l'émission de France 2 Cent minutes pour convaincre, Sarkozy s'était d'ailleurs prononcé en faveur de la ratification parlementaire du traité constitutionnel européen de Giscard au motif que c'était un texte compliqué pour le grand public ! De même, dès qu'il a présenté son projet de mini-traité, puis de traité simplifié, il a expliqué qu'il soumettrait ce nouveau document à l'approbation des députés et sénateurs réunis en Congrès et non aux électeurs.
Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que le chef de l'État soit favorable à la suppression de l'article 88-5 de la Constitution qui prévoit que toute nouvelle adhésion d'un État à l'Union européenne doit être soumise à référendum. On se souvient que Jacques Chirac avait employé cette astuce en 2005 pour mieux faire passer la pilule des négociations entre Ankara et Bruxelles et faire accroire au peuple que l'adhésion de la Turquie à l'U.E serait soumise, « dans dix ou douze ans », à sa souveraine appréciation.
En faisant voter cet amendement à la Constitution, Chirac savait qu'il ne prenait aucun risque, son successeur pouvant aisément obtenir l'abrogation de cette disposition.
Or, il ne fait plus aucun doute que Sarkozy supprimera l'obligation du référendum pour toute nouvelle adhésion à l'UE. Le socialiste Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des Affaires européennes après avoir été l'un des intimes du couple Hollande-Royal, s'est ainsi déclaré favorable à son abrogation pure et simple le 14 septembre alors qu'il était auditionné par la commission Balladur chargée de la réforme des institutions. Quelques jours plus tard, Bernard Kouchner allait dans le même sens, ajoutant que « le président souhaite aussi » la disparition de l'article 88-5. Enfin, Edouard Balladur, pourtant d'origine arménienne (Baladurian), ami très proche de Sarkozy, tient un langage identique dans Le Monde du 25 septembre: « A titre personnel, je serais assez partisan d'assimiler un élargissement de l'Union à une modification des institutions européennes, puisqu'il conduirait à une répartition nouvelle des droits de vote. Dès lors, pourquoi ne pas retenir la même procédure que pour un changement de la Constitution ? Le président aurait le choix pour ratifier le traité d'élargissement entre un référendum ou le vote du Congrès. Le comité en débattra. »
Difficile de voir dans ce tir croisé le simple effet du hasard. Interrogé sur la question, le président de la République s'est prudemment rangé derrière l'avis de l' ex-Premier ministre: « Quand Edouard Balladur aura rendu son rapport, j'aurai l'occasion de prendre position moi-même. »

IMPOSER L'ADHÉSION A UNE OPINION RÉCALCITRANTE

Billevesée, son choix étant déjà fait. La suppression du référendum obligatoire sert d'évidence à imposer à une opinion réticente l'entrée de la Turquie dans l'UE puisque Sarkozy, contrairement à son engagement pendant la campagne, ne refuse plus cette perspective. « La France ne s'opposera pas à ce que de nouveaux chapitres de la négociation entre l'Union et la Turquie soient ouverts dans les mois et les années qui viennent, à condition que ces chapitres soient compatibles avec les deux visions possibles de l'avenir de leurs relations: soit l'adhésion, soit une association aussi étroite que possible sans aller jusqu'à l'adhésion » avait déclaré Sarkozy le 27 août dans son adresse aux ambassadeurs, rompant par là avec ce qu'il avait clairement dit dans son débat d'entre-deux tours avec Ségolène Royal. Matamore, il avait alors assuré que jamais, au grand jamais il n'accepterait l'intégration du pays d'Erdogan à l'Union Européenne.
Comme le note le Front national dans un communiqué intitulé « Turquie: Sarko le candidat a promis - Nico l'Américain a menti », « L'intention de Nicolas Sarkozy de supprimer la procédure du référendum pour tout élargissement européen confirme le reniement cynique du Président de la République sur la Turquie. Après les manifestations d'intention de renforcer la présence française en Afghanistan ou de réintégrer totalement l'OTAN, ce projet de réforme constitutionnelle, absolument injustifié et antidémocratique, confirme la servilité atlantiste du locataire de l'Elysée. » « Un tour en bateau estival et un mauvais hamburger lors d'un pique-nique chez le président Bush, ajoute le mouvement de JeanMarie Le Pen, auront donc suffit à enterrer les déclarations vibrantes du candidat Sarkozy sur la Turquie "pays asiatique" et son fameux serment préélectoral "je ne vous trahirai pas, je ne vous mentirai pas, je ne vous décevrai pas" ».
Las, il n'est même pas sûr que la suppression du référendum, qui prouve l'insondable mépris du peuple qui l'a pourtant plébiscité, suffira à ouvrir les yeux des sarkocus.
Fabienne BALLARIN. RIVAROL 5 oct 2007

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