mardi 2 octobre 2007

IMMIGRATION "CHOISIE" IMMIGRATION "SUBIE"

LES CONVICTIONS DE NICOLAS SARKOZY
Si le ministre de l'intérieur mettait la même énergie à résoudre les problèmes du pays qu'il en consacre à sa promotion personnelle, nul doute que les dirigeants du Front national et leurs épigones pourraient faire valoir leurs droits à une retraite bien méritée. Ce week-end donc, Nicolas Sarkozy faisait la promotion, sur les radios, les télévisions et les journaux, de son projet à propos de l'immigration.
"De l'immigration subie à l'immigration choisie", tel est son accroche publicitaire du moment, tant il est vrai que Sarko ne parle finalement que par slogans. Et après, il s'étonne que madame ait joué les filles de l'air avec un homme de réclame. On tombe toujours du côté où l'on penche. Comme souvent, les diagnostics de ce vibrion ne sont pas faux : regroupement familial nous ayant fait passer d'une immigration de travail à une immigration de peuplement, 95 % des immigrés légaux n'exerçant aucune profession, si ce n'est celle consistant à faire la queue aux guichets des aides sociales. Il n'y a guère que les clandestins qu'il n'évoque que de loin. Il a tort, les chiffres sont là: six cent mille "sans-papiers" sur notre sol, à en croire le sénateur radical-socialiste de Guyane, Georges Othily, dont les propos iconoclastes en l'occurrence, ont récemment causé quelque bruit. A cela convient-il encore d'ajouter un chômage de masse tel que Dominique de Villepin en est même venu à l'évoquer, à mots couverts, appelant, pour qui sait lire entre les lignes, le retour à une sorte de préférence nationale: « Priorité à l'emploi pour nos nationaux, pour ceux qui vivent dans notre pays, et, pour le futur, dès lors que nous aurions d'autres besoins, faire en sorte que nous répondions à l'exigence de notre économie. »
Mais Nicolas Sarkozy veut désormais « choisir» et non point « subir ». Ce faisant, il ne fait qu'organiser la soumission. En effet, et ce, quitte à tomber dans le truisme le plus vulgaire, « choisir », c'est avoir le choix. Le choix, par exemple, de renvoyer chez eux, ceux et celles qui vivent illégalement sur notre sol. Mais de tous les émeutiers étrangers, qu'ils soient ou non illégaux, ayant embrasé nos banlieues, en novembre dernier, un seul est, - pas zéro ni deux, mais juste "un" seul pour le moment, en passe d'être expulsé. Et l'immigration « choisie» de Sarkozy ne nous laisse donc guère le choix. Ainsi, dans un entretien accordé au Journal du dimanche du 5 février dernier, affirme-t-il:« Chaque année, le gouvernement indiquera au Parlement des objectifs quantitatifs prévisionnels de visas et de titres de séjour pour les trois années à venir, en fonction des capacités d'accueil de la France en matière d'emploi, de logement, d'Education nationale. » Ses fameux « quotas » sont donc pour le moment oubliés, laissant la place à des « objectifs quantitatifs» ; ce qui, tout bien pesé, veut à peu près dire la même chose. Dans notre n0 1091, Yves Daoudal a bien résumé les propos, à priori contradictoires, de ces deux frères ennemis. La préférence nationale de Villepin ? « Une tromperie majeure. ( ... ) Le gouvernement entend suivre à la lettre les moindres souhaits de la Commission européenne. » Laquelle entend, depuis des années "importer" quelques cent trente-cinq millions d'immigrés en Europe dans les prochaines années, tel que le préconisait d'ailleurs Alain Juppé dans les colonnes du Monde, peu de temps après son éviction de Matignon. D'ailleurs, le gouvernement français voudrait-il inverser la tendance ! qu'Il ne le pourrait pas, lié ! qu'il est par d'innombrables traités qui sont autant de transferts de souveraineté en direction d'instance supranationales. L'immigration choisie de Sarkozy ? « Il est stupéfiant, en effet, de constater, relève Daoudal, dans ce même numéro de "National hebdo", à quel point les propositions de Sarkozy correspondent à celles du "Livre vert" de la Commission européenne qui exhorte les Etats membres à mettre en œuvre une politique commune, car "des flux d'immigration plus soutenus pourraient être de plus ,en plus nécessaires pour couvrir les besoins du marché européen du travail et pour assurer la prospérité de l'Europe." »
Deux mois plus tard, soit en mars 2005, les auteurs d'un autre Livre vert lâcheront le morceau et écrivent, noir sur blanc, qu'Il s'agIt la d'une « immigration de peuplement». Cela étant établi, on comprend mieux à quel point ! la marge de manœuvre gouvernementale est aussi ténue que sa laisse est courte.

Alors, que cherche Nicolas Sarkozy et quelles sont ses véritables convictions sur le sujet? Pas besoin d'être bien malin pour le savoir. La réponse tient en un nombre à quatre chiffres : 2007. Et c'est ainsi qu'un outsider prometteur est en train de faire une campagne de second tour alors que le premier n'est même pas commencé et qu'il ne sait toujours pas s'il pourra y concourir. Un coup de barre à gauche, voire plus à gauche, en militant pour l'abolition de la double peine ; et un coup de barre à droite, voire au-delà de la droite de la droite, en jouant du biceps quant à l'immigration clandestine ? Même ses plus proches conseillers l'ont mis en garde: « Autant Le Pen peut "donner des gages" aux enfants de l'immigration parce que son socle politique est assez fort pour lui permettre ce "grand écart". Mais vous ... » Oui, mais lui ? Lui, rien. Rien de crédible. Ou alors, aussi crédible qu'un Philippe de Villiers qui, samedi dernier, a annoncé à Paris, qu'il entendait incarner une « candidature hors système» ; soit un bidule tout aussi plausible que celui qui voudrait faire passer Daniel Cohn Bendit pour une tête de liste du Ku-Klux-Klan. Sarko navigue à vue. Donne tour à tour des gages en trompe-l' œil à ses électeurs habiroux rapatriés - Arno Klarsfeld chargé de réécrire l'histoire de France en Algérie - ; mais pourquoi pas Daniel Prevost qui, lui au moins, a des ancêtres là-bas et grâce auquel, faute de mieux, on aurait au moins bien rigolé ? Déroule le tapis devant les représentants de l'islam de France, mais en faisant la part belle aux hystériques et en laissant exclure du CFCM, tous les musulmans ayant compris qu'à défaut d'être une chance pour la France, la France pouvait en être une pour l'islam, provoquant ainsi la consternation d'une large majorité de Français musulmans. Fait des risettes aux comités Théodule d'extrême-gauche et ne comprend même pas que s'il y avait un geste de mansuétude à accorder aux immigrés clandestins, ce serait au moins en direction de ceux qui travaillent paisiblement sans rien demander à personne, plutôt qu'à des voyous encombrant des prisons déjà surpeuplées. Cligne de l'œil vis-à-vis d'un électorat lepéniste qu'il peine manifestement à comprendre, puisque venant à la fois de la droite comme de la gauche. Et, surtout, ne comprenant pas que la préoccupation majeure, des Français consiste en un besoin d'autorité et de protection, à la fois mâle et bonhomme, efficace et juste. Soit tout ce qu'il n'est pas en mesure d'apporter à ceux dont il brigue les voix avec un acharnement, certes énergique, mais tragiquement vide de sens. L'élection présidentielle, en cette Cinquième république, fût-elle finissante, demeure un rendez-vous entre un homme et un peuple. Nicolas Sarkozy, lui, semble s'être seulement donné un rancart avec son plan de carrière. Il est à craindre que cela ne suffise pas. En amour comme en politique, il faut être deux. Aujourd'hui, Sarko est seul avec lui-même. On a connu meilleure compagnie.
Béatrice PEREIRE National Hebdo février 2006

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