vendredi 24 août 2007

Sarkozy aboie, la BCE passe et casse

Nicolas Sarkozy sera-t-il capable de défier la BCE?

La vitalité économique d'une nation dépend de plusieurs ingrédients : la politique budgétaire de l'État, l'importance des prélèvements obligatoires, la dynamique de la consommation, le coût de la main d'œuvre, l'évolution de la valeur de la monnaie par rapport aux autres devises (qui conditionne les exportations et les importations) et le niveau des taux d'intérêts auxquels les entreprises empruntent pour investir, et les ménages pour s'équiper. Un savant dosage permet de réaliser une forte croissance ou bien de s'enfoncer dans la crise.

Hypocrisie

Au cours de la campagne présidentielle, le futur vainqueur avait promis qu'une fois élu, il reviendrait sur les pouvoirs de la Banque centrale européenne (BCE). En fait, il s'agissait d'une promesse très hypocrite (pléonasme ?). Elle consistait, d'une part, à reconnaître implicitement la pertinence des critiques souverainistes sur les risques d'un euro fort, pour mieux récupérer cet électorat qui, contrairement aux apparences, ne s'est pas évaporé, et, d'autre part, à flatter les sensibilités européistes, en défendant l'idée qu'une simple réforme pouvait assurer un avenir à nos entreprises exportatrices. Mais l'hypocrisie suprême est apparue en pleine lumière lorsque la BCE, dirigée par Jean-Claude Trichet, ex-protagoniste des affaires du Crédit lyonnais, nommé par Jacques Chirac, a décidé de relever son taux directeur pour la huitième fois consécutive depuis 2005!
Ce taux sert à fixer le montants des intérêts auxquels les banques centrales des États membres de l'UEM (la zone euro) empruntent à Francfort pour ensuite prêter aux banques commerciales, qui à leur tour distribuent des crédits aux particuliers, aux entreprises et aux services publics.
Les hausses de taux directeurs vont donc se répandre dans l'ensemble du circuit économique et rendre la consommation et l'investissement plus onéreux. Avec des taux directeurs qui atteignent aujourd'hui 4 % et atteindront vraisemblablement plus dans les mois qui viennent, les banques seront contraintes de porter leurs propres taux à 6 ou 7 %, ce qui alourdira le niveau d'endettement de tous les emprunteurs.

Souveraineté limitée

L'État français, confronté aux dépenses consécutives aux promesses électorales (bouclier fiscal plafonné à 50 % des revenus imposables, défiscalisation et exonération des charges sociàles des heures supplémentaires, déduction fiscale d'une partie des intérêts des emprunts pour les acquéreurs d'une résidence principale, etc.), ne pourra plus respecter les critères du pacte de stabilité européen, qui interdisent au déficit des comptes publics de dépasser la limite de 3 % du PIB. Pour éviter une amende que les instances bruxelloises ne manqueront pas d'imposer à la France, le gouvernement de M. Sarkozy sera alors contraint, comme celui de M. Mauroy en 1983, ou celui de M. Juppé en 1995, de renoncer à ses propres choix politiques.
Dans un régime de souveraineté limitée, les candidats aboient pendant la campagne électorale, mais un mois jour pour jour après l'élection du meilleur aboyeur public, la BCE rappelle que le pouvoir ne se trouve plus sur les bords de la Seine, mais sur celui du Main à Francfort ; elle "passe" et reprend la main !
Au-delà de la démonstration de l'hypocrisie politique de notre "matrice républicaine", la décision de la BCE est en fait beaucoup plus dommageable qu'un simple surcoût du crédit pour les futurs emprunteurs. Non contente de priver nos entreprises d'un crédit bon marché, elle vient aussi de renforcer la valeur de l'euro. Le prix d'une monnaie est en effet étroitement lié au niveau des taux d'intérêts. Plus ils grimpent, plus les spéculateurs misent sur cette devise puisque les capitaux qu'ils vont prêter rapporteront plus que dans une devise concurrente. Or, la Réserve fédérale américaine a renoncé à accroître ses propres taux directeurs pour relancer l'économie des États-Unis, si bien que le dollar devrait continuer à perdre de sa valeur par rapport à l'euro. Nos exportations seront de plus plus compromises alors que les importations deviendront de plus en plus compétitives.
Pendant que les spéculateurs de Francfort et d'ailleurs se frottent les mains, à Saint-Hyppolyte-du-Port, dans le Gard, les employés de Jallatte se frottent les pieds pour manifester leur désarroi. Leur entreprise, leader européen des fabricants de chaussures de sécurité, sera bientôt délocalisée, et près de 300 emplois seront supprimés. La BCE "passe" et casse toute notre industrie en annihilant les ingrédients du dynamisme économique national.
Henri Letigre: Action Française 2000 juillet 2007

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