mardi 30 septembre 2008

Bilan globalement négatif

CE n'est pas tous les jours qu'on se sent rajeunir. Il faut donc remercier Nicolas Sarkozy pour son numéro télévisé du 24 avril. On attendait l'hyperprésident mûri par l'exercice du pouvoir et les épreuves (il a reconnu quelques "erreurs" pour assurer tout aussitôt qu'elles étaient vénielles au regard de ses prodigieuses réussites), on eut le candidat - apôtre de la " valeur travail ", chantre de l'identité nationale, terreur de la voyoucratie et des clandestins allogènes - qui semblait invincible et en effet le fut. Le député UMP Lionnel Luca souhaitait que le chef de l'Etat « retrouve l'esprit de la campagne présidentielle : l'enthousiasme, le volontarisme et l'humilité ». Il a été entendu, au moins par éclipses, mais nous ne sommes plus en campagne, et la magie s'est dissipée, tout comme la fiction du couple idéal que Nicolas formait l'an dernier avec Cécilia - au fait, qu'est devenu le petit Louis, élément essentiel du plan marketing de 2007 ? Vit-il à Dubaï avec sa mère et le nouveau mari d'icelle ou à Paris avec son père ? Questions intéressantes mais que les journalistes se sont poliment abstenus de poser, se contentant de l'assurance donnée par le président que, dans sa « vie privée », « tout était rentré en ordre ».
L'émission s'intitulait « En direct de l'Elysée ». « 100 minutes pour convaincre » eût été un titre plus adapté, à ceci près que Sarkozy n'a convaincu que ceux qui, telle Nadine Morano tout heureuse d'avoir reçu un maroquin, avaient envie de l'être. Car dans ce bilan, les impasses ont alterné avec les mensonges, voire les énormités comme cet interminable développement sur l'impossible naturalisation des clandestins alors qu'on l'interrogeait sur leur régularisation. L'ancien avocat ignore-t-il à ce point le droit, ou s'est-il simplement projeté dans un avenir proche, les régularisés de demain étant les naturalisés (et donc les électeurs) d'après-demain ?
QU'IL y ait de la déception, qu'il y « ait des attentes, qu'il y ait des problèmes, qu'il y ait des difficultés, non seulement je le sais, je l'entends mais je m'y étais préparé », a notamment déclaré le chef de l'Etat. Mais, alors, pourquoi dit-il avoir été surpris en août par l'envolée du prix des hydrocarbures et la crise américaine des subprimes, qu'il accuse d'avoir, ainsi que la cherté de l'euro par rapport au dollar, torpillé sa politique de relance économique alors qu'il s'était voulu « le président du pouvoir d'achat » ? Outre qu'on n'a pas le souvenir que le très européiste Nicolas Sarkozy ait jamais été hostile à la monnaie unique, l'épuisement des énergies fossiles est un fait avéré : le 26 janvier 2001, le n° du 50° anniversaire de RIVAROL contenait un cri d'alarme à ce sujet, et il est du reste bien dommage que le candidat vedette de 2007 n'ait pas été un lecteur assidu de notre hebdomadaire car il aurait su depuis deux ans au moins à quoi s'en tenir sur l'inéluctable éclatement de la bulle immobilière états-unienne. A qui fera-t-il croire d'ailleurs qu'ayant pris pour conseillère puis ministre des Finances l'une des avocates d'affaires les plus réputées d'outre-Atlantique en la personne de Christine Lagarde, il ait tout ignoré des turbulences qui, au-delà de l'Hyper-puissance, allaient ébranler le monde et plomber durablement la croissance ? Si le parler-vrai s'imposait, c'était bien dans ce domaine au lieu de persuader les Français qu'il leur suffirait d'élire Nico l'Enchanteur pour entrer dans une ère de prospérité.
ET bien sûr de sécurité. Sur l'immigration, remise au premier plan de l'actualité par l'affaire des sans-papiers cuistots ou serveurs et dont l'expulsion « tuerait le tourisme » si l'on en croit les syndicats patronaux de l'hôtellerie curieusement alliés de la CGT, le président était très attendu et il a retrouvé les accents du candidat pour rappeler avec bon sens que la France entretenait déjà 22 % de chômeurs immigrés susceptibles d'accomplir les besognes dont les Français sont censés ne plus vouloir, et marteler que, voulant éviter « un appel d'air », le gouvernement ne procéderait pas à une régularisation massive mais agirait « dans le respect de la loi ». Dont ,il se garda bien de préciser qu'elle donne depuis novembre 2007 aux préfets une très large latitude pour régulariser « au cas par cas ». L'ennui étant que chaque "cas" s'ajoutant aux autres dans une parfaite opacité, on aboutit à une régularisation globale.
Nicolas Sarkozy peut bien s'enorgueillir des 22 000 expulsions réalisées selon lui pendant l'année écoulée, cela ne règle en rien le problème lancinant du demi-million de clandestins allogènes, véritable armée d'occupation renforcée bon an mal an par 30 à 100 000 supplétifs. Qui ne contribuent pas peu au climat de violence. Or, sur ce point aussi les journalistes interrogeant le chef de l'Etat se sont montrés d'un tact exquis, n'abordant pas une fois ce sujet dont le traitement volontariste fut pourtant l'une des clés de la victoire du candidat UMP. Or, l'échec en la matière est patent : le jour précédent sa prestation télévisée, une sexagénaire avait été poignardée à mort par un clandestin asiatique (normal : elle avait refusé de lâcher son sac) près des Buttes-Chaumont et, au moment même où il parlait, une vingtaine de Jeunes encagoulés lapidaient - et blessaient trois policiers patrouillant à Villepinte, dans cette Seine-Saint-Denis toujours aussi explosive un an après l'élection du Rambo à Kârcher. Qui, incapable d'assurer une sécurité minimale à ses sujets, envoie en revanche un bataillon supplémentaire en Afghanistan, pour montrer de quel bois il se chauffe aux Taliban, coupables d'attenter aux droits de l'humanité en obligeant les femmes à porter la burqa et en privant les petites filles d'une scolarité normale. Mais, à ce compte-là, il faudrait envoyer paras et légionnaires guerroyer aussi dans les Emirats, en Arabie saoudite et surtout dans l'Irak "libéré" où le deuxième sexe, privilégié sous le "tyran" Saddam Hussein qui lui avait ouvert toutes les portes (université, justice, diplomatie, Parlement), est retombé en servitude.
ENCORE une fois, on admirera la complaisance des journalistes, étonnamment discrets sur le virage atlantiste du chef de l'Etat - dont cela constitue la seule véritable "rupture" avec ses prédécesseurs - pourtant aussi spectaculaire que lourd de conséquences.
De même ont-ils avalé sans broncher la tirade antiturque de Sarkozy, lequel a répété que s'il ne voyait pas la nécessité de consulter les Français sur l'entrée de la Croatie dans l'Union européenne, il organiserait au contraire un référendum sur l'adhésion d'Ankara. Mais les négociations avec l'ex-Empire ottoman ne seront finalisées que dans une dizaine d'années, autrement dit quand Sarko aura cédé la place. Sa solennelle promesse ne l'engage donc nullement ! En revanche, sa révision constitutionnelle donnant au chef de l'Etat le choix entre un vote du Congrès et un référendum pour l'élargissement de l'Europe laissera la voie libre à son successeur pour la solution la plus scélérate.
Comment expliquer que pas un de nos confrères n'ait soulevé ce point essentiel ? Que pas un ne se soit étonné quand l'Elyséen a souligné que l'une des principales raisons de courtiser éhontément la Chine est que ce « grand pays » siège au Conseil de sécurité de l'ONU où il peut empêcher d'accéder à la maîtrise nucléaire l'odieux Iran, « qui menace l'existence de l'Etat d'Israël » ?
LE 6 mai 2007, les Français avaient cru élire un président qui les protégerait de la "racaille" et des prédateurs industriels, qui défendrait bec et ongles leur gagne-pain et qui, pour préserver l'avenir de leurs enfants et celui du pays, irait « chercher avec les dents le point de croissance » dont on attendait miracles. Ils se sont donné un apparatchik du Nouvel Ordre mondial dont « l'existence de l'Etat d'Israël » et le réalignement sur l'Oncle Sam sont les priorités en politique étrangère, la « discrimination positive » en matière raciale étant le mot d'ordre sur le plan intérieur, avec l'inféodation à la Pensée dominante, incarnée par Jacques Attali, et l'acceptation de la dislocation de pans entiers de notre économie, que va aggraver, sous prétexte d'amélioration du fameux pouvoir d'achat, la multiplication des supermarchés, gros consommateurs d'importations en tout genre.
« Sarko pire que Jacquot ? » s'interrogeait RIVAROL le 13 avril 2007. Un an, pas mal de sondages de plus en plus négatifs et autant de couacs gouvernementaux plus tard, la cause est entendue. Par quelle malédiction - ou plutôt par quelle dégénérescence sommes-nous condamnés sous cette Ve République, dont on célébrera fin septembre le cinquantenaire, à aller depuis Georges Pompidou de président-Charybde en président-Scylla ?
RIVAROL. . du 2 mai 2008

lundi 29 septembre 2008

Face à la crise et à la récession, réduire le train de vie de l'Etat

Au lendemain de la faillite le 15 septembre de l'une des principales banques d'affaires américaines, Lehman Brothers, la troisième en six mois, qui a vu Wall Street et les différentes bourses européennes accuser le coup, le directeur du Fonds monétaire international s'est montré alarmiste. Parlant d'une crise financière «jamais vue» car elle est partie du « cœur du système », les Etats-Unis, et a touché le monde entier, Dominique Strauss-Kahn prévoit un ralentissement de « toute l'économie mondiale d'un demi-point à deux points » de croissance, y compris en Chine et dans les pays européens.
C'est dire à quel point paraissent dérisoires désormais les promesses de campagne de Sarkozy : avec lui, plastronnait-il, la croissance de l'économie française redémarrerait. A peine élu à l'Elysée, il se rendait d'ailleurs à l'université d'été du MEDEF, une première pour un chef de l'Etat, proclamant qu'il irait « chercher avec les dents » le point de croissance qui manquait au dynamisme et à la compétitivité de notre économie. Nous en sommes bien loin et, avant même la faillite de Lehman Brothers, le Premier ministre avait reconnu qu'il n'était même pas sûr que le Produit intérieur brut progresse de 1 % cette année, car « nous sommes frappés par une décélération de l'économie mondiale qui est très, très sérieuse ». En effet, selon une première estimation de l'Insee, le PIB de la France a reculé de 0,3 % au deuxième trimestre 2008. A ce stade, l'acquis de croissance - la progression que l'économie française est sûre d'atteindre si la croissance est nulle pour le reste de l'année - est de 0,9%.
UNE CROISSANCE QUASIMENT NULLE
De la même manière, compte tenu de la crise mondiale, l'Organisation pour la coopération et le développement économiques a fortement revu à la baisse sa prévision de croissance 2008 pour la France, à 1 % contre 1,8 % auparavant, dans ses perspectives économiques intérimaires. Pis encore, l'OCDE ne prévoit pas de « rebond faramineux » dès le troisième trimestre, et s'attend à ce que la France « croisse très peu pendant les deux prochains trimestres ».
Une situation évidemment désastreuse pour les finances publiques, le budget 2008 ayant été bâti voici près d'un an sur une hypothèse de croissance de 2,25 %. La croissance en berne rejaillit en effet sur les rentrées fiscales. Le ministre du Budget, Eric Woerth, avait déjà prévenu que le ralentissement économique entraînerait une perte de 3 à 5 milliards d'euros par rapport aux recettes escomptées. Le chiffre sera certainement beaucoup plus élevé. Or le gouvernement a cruellement besoin de ces recettes fiscales pour contenir le déficit public (Etat, Sécurité sociale et collectivités locales) qu'il s'est engagé à ramener à 2,5 % du PIB cette année. « Nous faisons tout ce que nous pouvons ( ... ) Je ne peux pas imaginer que la France dépasse à nouveau la barre des 3 % du PIB » autorisée par Bruxelles, confesse de manière assez peu rassurante Christine Lagarde dans un entretien à La Tribune. Quant au rapporteur de la commission des Finances du Sénat, l'UMP Philippe Marini, il n'exclut pas qu'en cas de croissance inférieure à 1,7 %, ce qui est d'ores et déjà acquis, « le déficit public atteigne, voire dépasse spontanément le seuil des 3 points de PIB », ce qui entraînerait des sanctions automatiques de la part de la commission de Bruxelles pour non-respect des critères de Maastricht. Un comble alors même que la France préside ce semestre l'Union européenne et que Sarkozy n'aime rien tant que se pavaner en faisant volontiers la leçon à tout un chacun et en étant souvent goujat avec les dirigeants étrangers.
UNE SÉRIEUSE CRISE ECONOMIQUE ET SOCIALE
Un minimum d'humilité et de discrétion serait bienvenu alors même que la récession menace la France et l'Europe. Selon l'OCDE, malgré la crise financière née outre-Atlantique, le Vieux Continent est plus proche de la récession que les Etats-Unis qui ont bénéficié des bons chiffres de leur commerce extérieur stimulé par l'abaissement du dollar alors que la zone euro était handicapée par le haut niveau de sa monnaie. Dans l'ensemble, le G7 (Allemagne, Italie, France, Grande-Bretagne, Etats-Unis, Japon, Canada) va continuer à traverser une « phase de faiblesse de l'activité jusqu'à la fin de cette année », pronostique l'OCDE qui considère que « la tempête sur les marchés de capitaux, le repli des marchés immobiliers et la cherté des matières premières continuent de peser sur la croissance mondiale ».
En France tous les voyants sont au rouge : les chefs d'entreprise sont inquiets, les ménages désertent les magasins ; les exportations ralentissent, le marché de l'immobilier accuse un sérieux coup de frein, la dette est officiellement proche de 1 250 milliards d'euros (en réalité plus de 2 000 milliards avec les retraites des secteurs publics et semi-publics) et, en partie indexée, ne cesse de s'accroître, les déficits annuels sont proches des 50 milliards tandis que la confiance des Français dans la solidité de leur banque tend à s'étioler. Pour BNP Paribas, l'économie française paraît être « clairement entrée dans une phase de récession, conséquence logique non seulement d'une crise économique profonde au plan international, mais aussi de handicaps structurels spécifiquement nationaux ». Au reste, les experts sont encore plus pessimistes pour l'année 2009. Le Centre de prévision de L'Expansion anticipe ainsi une progression du PIB de seulement 0,5 %.
DE NOUVELLES PONCTIONS DES MÉNAGES
Pendant sa campagne présidentielle Sarkozy s'était engagé à redonner de l'oxygène à l'économie française en baissant notamment les prélèvements. Or rien de tel n'a été engagé. Le fameux bouclier fiscal voté à l'été 2007 ne change pas substantiellement la situation des contribuables et, contrairement au socialiste Zapatero en Espagne, Sarkozy s'est bien gardé de supprimer l'ISF qui fait fuir les investisseurs et appauvrit les Français qui ont encore quelque bien. Dès que Christine Lagarde a proposé d'alléger l'ISF, François Fillon a aussitôt refermé le débat en disant que ce n'était pas à l'ordre du jour. Or du fait de la flambée de l'immobilier (même si aujourd'hui les prix des terrains, maisons et appartements commencent à se stabiliser voire à baisser très légèrement mais pas partout, tant s'en faut), beaucoup de Français se retrouvent assujettis à l'ISF alors qu'ils n'ont aucune fortune personnelle. Et la décision de Sarkozy d'augmenter l'imposition des revenus dits du capital (assurance-vie, loyers, intérêts, dividendes d'actions) pour financer le revenu de solidarité active (RSA) de Martin Hirsch, une mesure démagogique empruntée à la gauche et qui favorisera d'abord les immigrés , va encore appauvrir les classes moyennes qui toute leur vie avaient fait l'effort d'épargner.
Soit dit en passant, cette création du RSA, mesure plus politique que sociale, prouve que Sarkozy est bien décidé à briguer un second mandat en cherchant à séduire la gauche après avoir siphonné l'électorat du Front national. « L'objectif était clairement de brouiller les pistes, de poursuivre la logique d'ouverture, même si cela doit se faire au prix d'une déstabilisation de sa propre majorité et du patronat », confie d'ailleurs au Monde l'un des ministres du "G7" élyséen.
Ce qui est sûr, c'est que le financement de ce gadget va ponctionner encore davantage les Français dont le pouvoir d'achat ne cesse de baisser. Si l'on veut dire les choses plus crûment, nos compatriotes s'appauvrissent, leur niveau de vie diminue. La situation présente peut se résumer en une seule phrase : les salaires et pensions stagnent alors que tout augmente : l'essence, le prix de l'alimentation, des fruits et légumes en passant par le pain, les viennoiseries, les produits laitiers et toute autre denrée. Lorsque l'on fait ses courses au supermarché, là où naguère avec 400 francs l'on faisait le plein du chariot, 150 euros (1 000 francs) y suffisent à peine. Et chacun sait qu'aller au restaurant, partir en vacances, même pour un court séjour et une destination proche, représentent un coût de plus en plus exorbitant.
A QUAND L'ETAT AU PAIN SEC ?
Or il est faux de dire qu'il n'y a rien à faire pour améliorer la situation des gens. La première urgence serait de réduire le train de vie de l'Etat en faisant une chasse impitoyable à tous les gaspillages. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Economie, assure « impossible de compresser davantage les dépenses », ce qui est ahurissant. Comme nous l'avons souvent dit, il y a bien sûr les sommes colossales induites par, la politique dite de la Ville, l'Aide médicale d'Etat (AME) réservée aux clandestins, une politique d'immigration laxiste. Mais au delà il y a toutes les dépenses faramineuses faites par les princes qui nous gouvernent. Le mensuel Capital (n° 202) a consacré cet été un très intéressant dossier aux innombrables gaspillages au sommet de l'Etat, dans les collectivités locales et les organismes sociaux. La conclusion est accablante : « Maintenant que se lève un coin du voile (la Cour des comptes va désormais ausculter le budget de l'Elysée et celui de l'Assemblée), on constate à quel point nos élus sont adeptes du "faites ce que je dis, mais pas ce que je fais", L'administration est sommée de se réorganiser pour économiser 8 milliards d'euros avant la fin du quinquennat, mais ceux qui lancent ces réformes et les votent semblent s'exclure de l'effort collectif. La gestion pour le moins dilettante du budget de l'Elysée comme les privilèges des députés (retraites en béton et distribution discrétionnaire de subventions) contredisent la rigueur affichée. »
Quelques exemples parmi tant d'autres des privilèges exorbitants de leur République : dans sa lutte contre les régimes spéciaux de retraite, la majorité parlementaire s'est bien gardée de toucher au sien. Au contraire, elle l'a rendu encore plus avantageux. Désormais, un seul mandat de député de cinq ans ouvre droit à une pension de 1550 euros par mois, l'équivalent de ce que perçoit en moyenne un salarié du privé au terme d'une carrière complète. Et, avec 22,5 ans de cotisations, un élu s'assure 6 200 euros par mois, soit 89 % de son indemnité parlementaire ! Un taux de recouvrement à faire mourir de jalousie les cadres du privé qui perçoivent 50 % de leur dernier salaire après quarante ans d'effort. Et que dire de la présidence du Sénat qui dépense chaque année 2,5 millions d'euros ? De quoi employer une vingtaine de domestiques dans deux appartements de fonction somptueux, mais aussi garnir sa cave de grands crus (8 500 bouteilles), financer moult réceptions, dîners et cocktails (600 000 euros de frais de bouche par an) et visiter le pays (350 000 euros de voyages). Les contribuables prennent en charge les 25 conseillers et 17 secrétaires du frère Christian Poncelet, les 15 Peugeot 607 de fonction et l'indemnité présidentielle de 180 000 euros par an.
LA FRANCE IMPLOSE, LE BUDGET DE L'ELYSEE EXPLOSE
Le budget de l'Elysée suit la même courbe : Chirac l'avait déjà fortement augmenté, il a explosé sous Sarkozy. Le budget 2008 va ainsi dépasser les 100 millions d'euros contre 35 en 2007. Par ailleurs, l'Elysée et Matignon vont voler dans des jets flambant neuf puisque la flotte aérienne gouvernementale va être totalement renouvelée avec des Airbus 330 dont l'un sera aussi bien équipé que le fameux Air Force One du président des Etats-Unis. Et comme si cela ne suffisait pas, le chef de l'Etat s'offre une "Sarkomobile" blindée de 150 000 euros avec sièges en cuir, ordinateur et équipement de communication dernier cri. Alors même que Chirac avait fait acheter il y a seulement trois ans une Citroën C6 blindée toujours en parfait état. Pour Sarkozy et ses amis, les efforts et la rigueur, c'est bon pour les autres ...
Peut-on être plus cynique ?
Jérôme BOURBON. Rivarol du 19 septembre 2008

samedi 27 septembre 2008

Un camelot à l’Élysée

Nicolas Sarkozy continue de se présenter en homme nouveau, prêt à toutes les actions et les réformes possibles, imaginables, nécessaires, urgentes, innovantes, jeunes, modernes, dynamiques, on en passe et on en oublie sûrement… et personne ne vient lui rappeler que si rien n’a été fait à temps pour prévenir les difficultés du présent sans compter celles à venir, il n’y est tout de même pas totalement étranger : ancien ministre et même ministre d’État, outre ses nombreuses responsabilités communales, départementales ou régionales, qu’a-t-il jamais fait de concret en près d’un quart de siècle au service de l’État ?

Rares sont désormais les médias assez libres pour dénoncer l’imposture du personnage.

Certes, le spectacle de Nicolas Sarkozy est le seul à l’affiche, l’opposition politique est inexistante. Aussi, aurait-il bien tord de se gêner à occuper le terrain social par de fracassantes déclarations, de celles, de préférences, qu’on n’attendait pas dans sa bouche. Par exemple, hier à Toulon, devant 4000 de ses partisans, il a savamment discouru une heure durant pour expliquer comment va le Monde… ou plutôt comment il ne va pas, car nous avons frôlé le précipice et l’avons échappé belle quand le boulet de la catastrophe économique nous a frôlé. Et « la crise actuelle aura des conséquences dans les mois qui viennent sur la croissance, sur le chômage, sur le pouvoir d’achat… ». S’il le dit ! Rien n’est terminé et pour beaucoup le pire est à venir car tout est encore à faire, mais il est là pour cela, n’est-ce pas et on va voir ce qu’on va voir. Pourquoi pas ! Mieux vaut tard que jamais…

Cette crise venue d’outre-Atlantique, c’est tout bénéfice pour l’actuel hôte de l’Élysée qui peut continuer à arborer le costume de l’homme providentiel. Pour cela, il martèle quelques vérités et sonne le tocsin. On ne pourra pas lui reprocher de ne pas avoir prévenu les Français. Pour cela, il souhaite leur « dire la vérité ». Ce qui semble être la moindre chose de la part du Premier d’entre eux.

Mais c’est aussi la fausse note qui fait craquer le vernis et rompt l’enchantement !

Car en répétant une fois de plus qu’il dit la vérité aux Français, comme si cela ne coulait pas de source, Nicolas Sarkozy est semblable à ces personnages qui se croient obligés de clamer leur honnêteté. Ces individus qui jurent qu’ils ne vous trahiront jamais. Ces êtres qui vous martèlent qu’ils sont vos amis. Ces interlocuteurs qui promettent de ne jamais vous mentir… Toutes choses dont l’évidence devrait se suffire à elle-même pour qu’il soit aussi outrageant de les mettre en doute qu’inquiétant de s’en vanter !

C’est pour cela sans doute que le long discours du Chef de l’État sur la politique économique, souvent frappé au coin du bon sens, des bonnes intentions, des promesses merveilleuses et des engagements de bon aloi, laisse quelque peu dubitatif.

On l’écoute parce que le numéro est bien fait, bien huilé, que l’artiste a du rythme et du métier. Un peu comme ces camelots dans les foires qui vous vantent à merveille le dernier robot multifonctions dont vous ne pouviez déjà pas vous passer avant même qu’il n’ait été imaginé.

C’est presque automatiquement, quasi-inconsciemment, que vous vous apprêtez à l’acheter, quand brusquement retentit en vous un petite sonnette d’alarme…

C’est que vous en avez déjà acheté tant et tant, de ces merveilleuses machines qui finalement se ressemblent toutes… et que vous avez soigneusement rangées au fond d’un placard, faute d’avoir jamais trouvé l’occasion de les utiliser.

Un discours de Nicolas Sarkozy, c’est un peu la même chose : c’est merveilleux, c’est excitant, c’est tentant, mais c’est finalement bien inutile !

Et puis, à force, on n’a plus vraiment beaucoup de place dans les placards !

Philippe Randa http://www.no-media.info/

vendredi 26 septembre 2008

Sarkozy aligné... jusqu'au «cataclysme»?

C'EST entendu : après avoir massivement publié, parfois à la une, la photo (prise en 1993 et mise aux enchères par Christie's) d'une Carla pas encore Sarkozy aussi nue que la Vénus de Botticelli, la presse britannique s'est enflammée pour notre première dame dont l'élégance, la classe et les bonnes manières auraient séduit aussi bien les Windsor que les badauds, lesquels - mauvais présage pour le couple ! - verraient en elle, au choix, une « nouvelle Jacqueline Kennedy » ou une « nouvelle princesse Diana » . Mais au-delà des atours arborés par l'épouse du chef de l'Etat, c'est le discours de celui-ci à Westminster qu'on retiendra de cette visite d'Etat outre-Manche. Avec la confirmation, devenue engagement au sommet de l'OTAN qui s'achève aujourd'hui à Bucarest, de l'envoi de nouvelles troupes françaises en Afghanistan où, avec 2 200 hommes, notre contingent est déjà l'un des plus nombreux de la Force internationale d'assistance à la sécurité (ISAF).
Ce "renforcement" portera-t-il sur 1 000 soldats (placés sous commandement américain), ou 3 000 comme le prévoient certains experts ? Question subalterne, eût dit de Gaulle (auquel Sarkozy a bien entendu rendu hommage lors de son séjour londonien), l'essentiel étant de « permettre au peuple afghan et à son gouvernement légitime de construire un avenir de paix » car « nous ne pouvons pas accepter un retour des Taliban et d'AI Qaïda à Kaboul. La défaite nous est interdite, même si la victoire est difficile », a martialement déclaré l'Elyséen devant les membres des Communes et de la Chambre des Lords réunis pour l'entendre. Et le président de préciser que la France et le Royaume-Uni, - que devraient lier selon Sarkozy une entente non plus cordiale mais "amicale" et même une «nouvelle fraternité», et pas seulement d'armes - « sont déterminés à rester engagés, côte à côte, avec tous nos alliés, en Afghanistan ». Un guêpier où, avait-il déjà promis en novembre dernier devant le Congrès américain puisque c'est décidément aux parlementaires étrangers, et non à la représentation nationale - à laquelle a été octroyé mardi un débat sans vote, comme on jette un os à un chien - que le président réserve la primeur de nos engagements militaires (1), « la France restera engagée militairement aux côtés des Etats-Unis aussi longtemps qu'il le faudra ».

COMMENT, « aussi longtemps qu'il le faudra », mènera-t-on cette sainte croisade alors que « les caisses sont vides », et au détriment de quels autres postes sera-t-elle financée alors que les Armées crient misère ? La même question se posant d'ailleurs pour la Grande-Bretagne qui, le jour même où elle recevait royalement le couple Sarkozy, apprenait que deux anciens joyaux de son industrie, les firmes automobiles Jaguar et Land Rover, cédées à Ford en 1989, avaient été revendues par l'Américain au groupe indien Tata, une sacrée revanche des ex-colonisés sur l'Empire des Indes, et une insupportable humiliation pour John Bull. Qui dit en effet que Tata ne délocalisera pas à Bombay, privant ainsi d'emplois les 19 000 Anglais travaillant encore sur les sites, tout comme 600 métallos du site lorrain de Gandrange racheté avec Arcelor par l'Indien Lakshmi Mittal vont se retrouver sur le sable malgré la promesse solennelle que leur avait faite en février le chef de l'Etat de mettre tout en œuvre pour leur éviter cette issue fatale ? Le moment était en tout cas mal choisi pour Sarkozy d'exalter la réussite économique du Royaume-Uni qui, a-t-il jugé bon de dire à Westminster, « est devenu un modèle, une référence dont nous devons nous inspirer ».

OUTRE le coût de l'aventure afghane se pose la question de sa pertinence que le candidat à la succession de Chirac avait d'ailleurs formellement contestée entre les deux tours de l'élection présidentielle, laissant ainsi prévoir un retrait de nos troupes... qu'il entend aujourd'hui «renforcer». En arguant de l'indispensable « guerre contre le terrorisme ». Mais, depuis la défaite du régime taliban et son remplacement par un gouvernement et un président «démocratiques», l'Afghanistan est redevenu le premier producteur mondial d'opium avec 165 000 hectares cultivés, contre 100 000 en 2005, et 6 100 tonnes d'opium brut exportées l'an dernier. Des attentats ou des overdoses d'héroïne (135 000 usagers réguliers en France), lesquel(le)s causent le plus de victimes ou de lésions irréversibles et déstabilisent le plus les sociétés occidentales ?
Si, de l'aveu même du site < www.armees.com >, sont dérisoires les efforts de l'ISAF pour simplement enrayer une culture aussi dévastatrice, on voit mal comment cette Force, qui agit d'ailleurs sans mandat de l'ONU, pourrait refaire un Eden de l'ancienne Transoxiane - qui, du reste, n'a jamais connu que rébellions et guerres civiles - et de la débarrasser des factieux et des fanatiques.
Et puis, est-il vraiment judicieux de se mettre à la remorque de l'Hyperpuissance alors que celle-ci, mise en échec en Irak comme en Afghanistan, risque d'entraîner la planète dans une crise financière et donc économique sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale ?
Le 20 mars dernier, constatant qu'aux Etats-Unis, malades d'une monnaie et d'un système bancaire pourris mais aussi de la guerre d'Irak qui, selon un rapport de la Commission économique du Congrès, a déjà coûté 526 milliards de dollars, l'économie « stagne et se contracte peut-être déjà », l'Organisation pour la coopération et le développement économiques révisait nettement à la baisse ses prévisions de croissance américaines qu'elle n'évalue plus qu'entre 0,1 % et 0,0 %. Et si l'OCDE estimait que, dans la zone euro, le ralentissement a été « moins brutal » qu'aux Etats-Unis, elle n'excluait pas une nette récession aggravée par une montée de l'inflation, cependant qu'encore plus catastrophistes, les experts indépendants _ du LEAP/2000 (qui avaient prévu en janvier 2007 la crise "systémique" des subprimes) annoncent, en provenance des USA, un « cataclysme boursier fatal » évidemment appelé à « frapper l'Europe de plein fouet » dès novembre prochain.
Le 26 mars, notre grande argentière Christine Lagarde a d'ailleurs rengainé tout optimisme pour admettre que le taux de croissance français serait très inférieur à 2 % cette année en raison des « envolées récentes du prix du baril et de l'euro » mais surtout de l'« aggravation des turbulences sur les marchés financiers ». Ce qui alourdira évidemment le déficit public, déjà supérieur en 2007 aux 2,4 % initialement prévus ... Et rendra illusoire l'objectif affiché d'assainir les finances publiques avant la fin du quinquennat de Nicolas Sarkozy.
N'importe, fasciné par l'Amérique comme tant de ses semblables, le chef de l'Etat persiste et signe dans son alignement sur un pays infiniment plus dangereux que la nébuleuse Al Qaïda pour la stabilité du monde. Jusqu'où nous entraînera sa fascination, celle que ressent le serin devant le serpent ?
<>. Rivarol du 4 avril 2008
(1) Le 27 mars, Jean-Marie Le Pen s'est d'ailleurs indigné de l'attitude de Nicolas Sarkozy annonçant « au Parlement britannique que la France va encore renforcer sa présence militaire en Afghanistan ». « Cette désinvolture dans l'empressement à jouer les supplétifs des Anglo-américains est une offense à la Nation », estime le président du Front national qui ajoute que « nos soldats n'ont pas à risquer leur vie pour les manèges géopolitiques de l'Oncle Sam ».

jeudi 25 septembre 2008

Sarkozy maintient le cap... vers l'abîme !

Les pouvoirs publics ont toujours le plus grand mal à reconnaître une défaite et à en tirer les conséquences. Depuis François Mitterrand, tous les présidents de la République qui ont perdu la majorité à l'Assemblée nationale ont refusé de se retirer. Et on se souvient qu'après l'échec du référendum sur la Constitution européenne le 29 mai 2005, Jacques Chirac avait nommé un gouvernement encore plus européiste que le précédent, où ne figuraient que des personnalités ayant voté oui et l'Elyséen avait même confié le ministère des Affaires étrangères à l'eurolâtre Philippe Douste-Blazy ! Manifestement Sarkozy a retenu les leçons de ses prédécesseurs dans sa façon de nier le vote des Français.
LA NÉGATION DU VERDICT DES URNES
Certes, il ne s'agit que d'une défaite à des élections locales (encore que les cantonales aient une conséquence directe sur la composition du Sénat, donc sur le pouvoir législatif) mais l'analyse des résultats qu'a faite le chef de l'Etat lors du conseil des ministres du 19 mars est typique de la langue de bois des politicards refusant de voir la vérité en face. Les municipales, a affirmé l'oracle élyséen, « ont exprimé une attente, une impatience, une interrogation aussi sur la possibilité que les engagements de la campagne présidentielle puissent être tenus dans une conjoncture que chacun perçoit comme plus difficile. » Et Sarkozy d'ajouter : « Il n'y aura pas de changement de cap. » Ce qui est une manière d'occulter, de mépriser le verdict des urnes, les électeurs ayant dit avec assez de force qu'ils étaient mécontents du cap actuel.
Devant ses ministres, le président a promis qu'il n'y aurait « ni ralentissement des réformes, ni plan de rigueur » et a fixé au gouvernement. quatre priorités : « Remettre le travail au cœur dès politiques publiques. renforcer la compétitivité de notre économie, continuer à gérer avec sérieux (sic !) les finances du pays et concilier solidarité et responsabilité en matière de retraites, de prise en charge de la dépendance et de santé ». Une réforme des retraites étant annoncée pour le second trimestre 2008.
Concernant ce dernier point, on nous avait pourtant dit que la réforme entreprise en 2003 par François Fillon, alors ministre des Affaires sociales dans le gouvernement Raffarin, avait résolu pour vingt ans le problème du financement des pensions et garanti leur maintien. Et voilà que cinq ans plus tard, on remet le couvert, ce qui prouve que les réformes proclamées ne sont jamais que des réformettes qui ne résolvent jamais dans la durée une difficulté mais cherchent seulement à temporiser. Il faut donc s'attendre dans les mois qui viennent à un nouvel allongement des annuités, à une augmentation des cotisations et à une réduction des retraites. Ce qui est un véritable vol. Plus les Français cotisent, moins ils touchent !
Quant aux finances publiques, paraît-il, gérées « avec sérieux », cela prêterait à rire, le montant de la dette et des déficits n'ayant jamais été aussi élevé. L'on nous parle d'ailleurs d'un assainissement des finances pour 2012. Comme par hasard l'année de l'élection présidentielle! Et tout à coup il n'est plus question de réduction d'impôts alors que le candidat Sarkozy s'était engagé à faire baisser de quatre points le taux de prélèvements obligatoires au terme de son quinquennat.
Les autres chantiers au programme, sont l'éducation avec la énième réforme de l'école primaire et du lycée (que va mener Xavier Darcos, mais avec quelle légitimité ? Lequel Darcos est d'ailleurs l'invité d'honneur le 12 avril de la Grande Loge de France pour un colloque sur les progrès scientifiques et leurs conséquences éthiques), la rénovation des campus universitaires, la réforme de la recherche, la sécurité avec la loi de programmation militaire, la loi d'orientation et de programmation de la sécurité intérieure. Et l'immigration avec la mise en œuvre de la politique des quotas et la suppression de la double compétence juridictionnelle. Si, entre les deux tours des municipales, Sarkozy s'est rendu à Toulon (dont le maire Hubert Falco est promu secrétaire d'Etat chargé de l'Aménagement du territoire) pour parler d'immigration, c'est parce qu'il sait bien que c'est là son va-tout électoral et qu'il peut ainsi séduire l' électorat populaire. Le drame, c'est que plus il parle d'immigration, plus il la favorise par sa politique.
UN IMMIGRATIONNISTE ET UNE FÉMINISTE
Par ailleurs, le remaniement ministériel tel qu'il a été annoncé deux jours après un scrutin qui a vu la déroute de la majorité montre que le locataire de l'Elysée entend minimiser la défaite de son camp. Les électeurs ayant à leur tour pratiqué l'ouverture à gauche, en boudant l'UMP, Sarkozy s'adresse maintenant en priorité à ses fidèles. La nouvelle équipe compte six nouveaux venus, nommés à des postes de secrétaire d'Etat : Christian Blanc, Hubert Falco, Anne-Marie Idrac, Nadine Morano, Yves Jégo et Alain Joyandet, ces trois derniers étant des très proches du chef de l'Etal. Ce qui dilate un gouvernement que Sarkozy avait voulu resserré : 38 membres en tout, dont désormais une nette majorité d'hommes (25 contre 13 femmes). Juppé avait abandonné en cours de route ses "juppettes", Sarkozy prend à son tour des libertés avec la sacro-sainte parité.
A l'exception de l'ex-rocardien et ex-bayrouiste Christian Blanc, ancien président de la RATP et d'Air France qui devient secrétaire d'Etat chargé du développement de la région capitale, autrement dit du « Grand Paris », projet de regroupement de la capitale avec quelque 80 communes alentour (ce qui ne plaira pas forcément à Delanoë !) il n'y a pas de nouveau débauchage de personnalités de gauche. La lourde défaite de la majorité a manifestement mis un point final à la volonté de Sarkozy de promouvoir Jack Lang et Claude Allègre - que son combat contre le dogme du réchauffement climatique rendait d'ailleurs difficilement acceptable par un président ayant, à peine élu, organisé un « Grenelle de l'Environnement ». Seul clin d'œil au centre, la nomination de l'ex "juppette" et ancienne présidente de la SNCF Anne-Marie Idrac qui devient secrétaire d'Etat chargée du Commerce extérieur.
Mais pour autant il n'y a aucune droitisation du gouvernement. Le très sarkoziste Yves Jégo, promu secrétaire d'Etat à l'Outre-Mer en remplacement de Christian Estrosi, lequel a préféré se consacrer à son nouveau mandat de maire de Nice, est connu pour être un immigrationniste forcené. Sous la précédente législature, il avait été un des rares députés UMP à militer en faveur du vote des étrangers aux élections locales, suivant en cela les vues de son mentor et il est un farouche partisan du droit du sol.
De même, le secrétariat d'Etat à la Famille confiée à Nadine Morano montre à quel point Sarkozy est un libéral-libertaire. « On aimerait se réjouir de voir la famille faire enfin son apparition dans l'organigramme gouvernemental, note Jean-Marie Le Pen dans un communiqué, mais confier le poste à Nadine Morano relève de la provocation. Cette personne, qui vient d'être sévèrement rejetée par les électeurs de Toul, n'est pas connue pour défendre la famille, mais pour militer en faveur du mariage homosexuel, de l'adoption par les couples homosexuels, de la procréation assistée pour les homosexuels, et de l'euthanasie » constate le président du Front national.
UNE SŒUR AU GOUVERNEMENT
Nadine Morano a tout pour plaire puisqu'elle est affiliée à la Grande Loge Féminine de France. Après le frère Xavier Bertrand chargé du Travail et membre du Grand Orient de France, voici la sœur Morano. Sarkozy en rajoute une couche dans son syncrétisme philosophique et religieux ! Morano avait d'ailleurs fermement condamné les quelques propos pourtant anodins sur l'homosexualité tenus par le député UMP Christian Vanneste et qui lui ont valu une sévère condamnation en première instance et en appel et elle s'est prononcée, « à titre personnel, pour une exception d'euthanasie » à l'occasion de l'affaire Chantal Sébire. Aussi l'association Laissez-les-Vivre renouvelle-t-elle avec raison ses « mises en garde contre cette discrète mais efficace militante de l'euthanasie, qui ne considère la loi Léonetti (encore un frère!) de 2005, légalisant l'euthanasie "passive", que comme une simple étape vers la légalisation de l'euthanasie "active ", et dont les familles ont tout à craindre »
En tout cas, on se demande comment la "très catholique" Christine Boutin, dont une autre secrétaire d'Etat, Fadela Amara, vient de donner au magazine homosexuel Têtu une interview très « gay friendly », va pouvoir cohabiter de plus avec une Nadine Morano, sauf à aller encore plus loin dans la mise entre parenthèse et le reniement de ses convictions. On notera aussi que, finalement et contrairement à une rumeur savamment instillée par l'Elysée, Philippe de Villiers n'a pas été intégré au nouveau gouvernement. Il est vrai que Jean-Marie Boekel - qui devient secrétaire d'Etat à la Défense et aux Anciens Combattants, son ancien titulaire Alain Marleix étant nommé à l'Intérieur et aux Collectivités territoriales pour préparer un nouveau charcutage des circonscriptions - avait, paraît-il, fait de la venue du vicomte un casus belli. Si le Vendéen n'est pas retenu, en tout cas pas cette fois-ci, ce n'est pourtant pas faute d'avoir fait tout ce qu'il pouvait pour redevenir ministre : soutien explicite à Sarkozy, mise en veilleuse de son opposition au traité de Lisbonne, complet silence radio depuis des mois.
Pour faire accroire qu'il y a quand même un changement, l'intitulé de nombreux ministères est modifié, avec l'accent mis sur de nouveaux secteurs : emploi, économie numérique, aménagement du territoire, famille, associations.
« Les changements d'appellations ne sont pas toujours des changements d'attribution », précise-t-on à l'Elysée. Ainsi Christine Lagarde devient ministre de l'Economie, de l'Industrie et de l'Emploi. La mention "finances" disparaît « mais elle garde ce domaine », a expliqué sans craindre le ridicule un conseiller de l'Elysée pour lequel « on voulait insister sur l'industrie ». De même Jean-Louis Borloo est ministre de l'Ecologie, du Développement durable, de l'Aménagement du territoire et, nouveauté, de l'Energie. Le nouvel intitulé du portefeuille de Brice Hortefeux est : ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire. La mention "codéveloppement" disparaît. En revanche, le portefeuille du secrétaire d'Etat aux Sports Bernard Laporte est complété. L'ancien entraîneur du Quinze de France retrouve la Jeunesse et est chargé en outre de la Vie associative. Les secrétaires d'Etat Luc Chatel, Laurent Wauquiez et Hervé Novelli voient également leur portefeuille modifié et complété.
Peut-on davantage se moquer du monde? Alors que la crise économique (la croissance ne sera que de 1,8 % a admis Lagarde, alors que tous les calculs tablaient sur 2 % au moins), financière, morale est d'une gravité inouïe, on s'amuse à ce jeu de chaises musicales et de changement de dénomination des postes ministériels ! Déjà, en mai 2007, Sarkozy avait voulu innover en présentant un gouvernement avec de nouveaux portefeuilles, des attributions grotesques comme ce secrétariat d'Etat chargé de la Prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement confié à l'ex-socialiste Eric Besson qui aura désormais en sus la responsabilité de l'Economie numérique.
LA PROMOTION DES VAINCUS
C'est en vain qu'on chercherait dans toutes ces combinaisons politiciennes la moindre cohérence. Ainsi, avant les législatives, Sarkozy avait édicté la règle que tous ses ministres battus devraient aussitôt démissionner, ce qui fut le cas, on s'en souvient, d'Alain Juppé, alors ministre de l'Ecologie et numéro deux du gouvernement et qui, depuis, a pris sa revanche aux municipales. Mais Juppé écarté, curieusement, les ministres étrillés quelques mois plus tard aux municipales conservent leur maroquin comme Darcos à l'Education, Albanel à la Culture, Lagarde - dont Sarkozy avait dit le plus grand bien lors de sa nomination au printemps 2007, précisant : « Si elle suit mes conseils, elle explosera à Bercy » - à l'Economie, Rama Yadé aux Droits de l' homme. Et le plus fort, c'est qu'une candidate UMP battue, Nadine Morano, fait même son entrée au gouvernement. Une promotion à la suite d'un échec, voilà ce qui augure bien mal de la suite de l'aventure, ou plutôt de l'historiette sarkozienne.
Jérôme BOURBON, Rivarol du 28 mars 2008

jeudi 11 septembre 2008

Dépénalisation du droit des affaires

Un cadeau fait aux banksters ?
SCANDALE de la Société Générale, délits d'initiés autour d'EADS, centaines de millions d'euros en liquide transitant par les caisses du MEDEF...
Quelle était l'urgence, face à la multiplication de ces comportements délictueux qui franchissent allègrement les frontières de toute décence, à l' heure où le Premier ministre reconnaît l'« état de faillite » de la France, tandis que le président admet que « les caisses sont vides » et où l'on s'apprête à demander au bon peuple de nouveaux efforts de "rigueur" et de "solidarité" (comprendre : moins de pouvoir d'achat et plus d'impôts... )?
Dépénaliser le droit des affaires bien sûr ! C'est-à-dire lutter contre « une pénalisation excessive de la vie économique qui produit des effets pervers et pèse sur l'attractivité économique de la France » comme le précise la lettre de mission confiée par la gouvernance Sarkozy à un aréopage de magistrats et de personnalités du big business (dont le directeur juridique de la Société générale et son avocat pénaliste, prière de ne pas sourire... ) chargé de plancher sur cette cruciale et urgente question.
Difficile de ne pas voir dans l'existence de ce « groupe de travail », qui a rendu son rapport le mercredi 20 février, la satisfaction de l'une des exigences du lobby des affaires qui cornaque notre coruscant président et se montre avec lui d'une très grande générosité en matière de prêts d'avions privés et de résidences luxueuses.
En effet, quelles réalités dissimule-t-on derrière la rassurante phraséologie administrative et les prétendues « exigences d'efficacité » ?
Tout d'abord la remise en cause des règles de prescription en matière d'abus de biens sociaux, prétendu « cauchemar des chefs d'entreprise » (à condition qu'ils soient malhonnêtes oublie-t-on de préciser... ) car il est, dans les faits, quasiment imprescriptible. En effet, comme la plupart des autres délits financiers, il est théoriquement prescrit au bout de trois ans mais à cette différence près : le départ de la prescription démarre non pas au moment où le délit est commis, mais lors de sa découverte, qui peut intervenir bien des années plus tard.
Le groupe de travail propose donc de porter le délai de prescription de l'ABS à sept ans mais de fixer le point de départ de cette prescription à la date de la commission des faits délictueux, nonobstant les tentatives de dissimulation.
Voilà une mesure qui, sans aucun doute, « améliorerait sensiblement l'attractivité de notre économie », surtout auprès des entrepreneurs indélicats et des investisseurs peu regardants sur la légalité ou la moralité des méthodes employées pour assurer leurs bénéfices.
Deuxième point clef du rapport : le passage des poursuites pénales aux poursuites civiles, beaucoup plus onéreuses, car à la charge du plaignant, ce qui ne manquera pas de freiner le nombre de mises en cause, les plaignants n'ayant souvent pas les mêmes moyens financiers que ceux qu'ils attaquent. Par ailleurs la procédure civile est surtout « gage de discrétion », une discrétion dont semblent très avides les éventuels futurs poursuivis.
Bref, le rapport du groupe de travail, qui dépend des attributions de la surchargée Mme Rachida Dati (garde des Sceaux, candidate aux municipales à Paris, conviée au moindre déplacement à l'étranger de Nicolas Sarkozy), est un catalogue d'assouplissements et d'affadissements de notre législation qui semble prendre en compte exclusivement la position et les desiderata du mis en examen sans jamais se soucier du désir de transparence et de justice qu' exprime pourtant un peuple français de plus en plus écœuré par les dérives affairistes d'un pouvoir qui semble avoir remplacé la traditionnelle devise républicaine par « Argent, Rendement, Productivité ».
Comment, en effet, expliquer aux Français la nécessité d'un "allégement" de l'encadrement juridique des pratiques affairistes alors que les infractions financières ne sont déjà sanctionnées que par de très théoriques peines de prison (généralement du sursis), des amendes ridicules (plafonnées à 375 000 euros quand certains détournements peuvent atteindre le milliard) et que les « délits d'initiés » ne sont quasiment jamais condamnés, bien que souvent poursuivis pénalement, faute de preuves tangibles en amont ?
Exemple récent : on semble se diriger vers un abandon total des charges et poursuites à l'encontre des cadres d'EADS qui avaient opportunément revendu pour plusieurs millions d'euros d'actions juste avant l'annonce des mauvais résultats de leur entreprise.
Ainsi, les ouvriers licenciés à la suite du gigantesque gâchis causé par une gestion désastreuse qui, abjecte paradoxe, a rapporté des bénéfices colossaux à ses responsables, apprécieront sans doute à sa juste valeur l'impératif sarkoziste d'assurer toujours plus d'impunité à ces voyous en col blanc.
Mais le « président rolex » a semble-t-il besoin d'une justice à sa mesure... laxiste et complaisante envers les requins jamais rassasiés de la finance internationale.
Xavier EMAN. RIVAROL du 29 février 2008

mardi 9 septembre 2008

Commerce extérieur : les fiascos de Sarko

Le gouvernement tablait sur un déficit de 31,7 milliards d'euros seulement dans nos échanges commerciaux l'an dernier (contre 28,238 milliards en 2006) mais la réalité est plus sinistre encore puisque le déficit commercial a battu eu 2007 un nouveau record : plus de 39 milliards d'euros ! Résultat, allègue-t-on en haut lieu, de l'euro fort et du ralentissement des exportations industrielles, notamment automobiles. Certes, mais pourquoi l'Allemagne, membre elle aussi de la zone euro, s'attend-elle au contraire à un excédent record, proche de 200 milliards d'euros ? Et pourquoi l'Italie, autre pays de l'Euroland , a-t-elle réussi sur un an, malgré son instabilité politique, à réduire son déficit de 28 à 10 milliards d'euros seulement ?
DES VOYAGES SABOTÉS
Evidemment en cause : le « problème de compétitivité » de la France et son manque de dynamisme comme le secrétaire d'Etat chargé du Commerce extérieur, Hervé Novelli, a été obligé de le reconnaître le 7 février, encore qu'en usant de périphrases: « C'est la dégradation du solde industriel hors énergie qui explique pour une large part la dégradation du déficit commercial ... Sur la dizaine de milliards d'euros de dégradation entre 2006 et 2007, plus de neuf viennent de l'automobile et des biens intermédiaires. » Seul, en effet, le secteur agro-alimentaire tire son épingle du jeu, avec un excédent record de l'ordre de 9 milliards d'euros.
Depuis des années, le candidat Sarkozy - ministre des Finances en 2004 - critiquait la pusillanimité et le caractère brouillon des initiatives en matière de commerce extérieur et annonçait que, lui élu, on verrait le changement. Certes, dans un tel domaine, un changement de politique se constate à long terme mais les sept mois de présidence Sarkozy n'auront nullement amélioré la situation en 2007. Année pendant laquelle la France, jusque-là troisième fournisseur de la Hongrie, par exemple, est passée à la cinquième place. Comment expliquer un tel recul alors que l'actuel président de la République est, à l'époque contemporaine, le premier Magyar porté au pouvoir hors de ses frontières ?
A l'évidence, Sarkozy de Nagy-Bocza n'a pas su exploiter cet avantage inestimable (mais il lui aurait fallu pour cela passer ses vacances sur les bords du lac Balaton au lieu de filer aux States pour y parader avec la jet-set de Wolfeboro), de même qu'il a littéralement saboté ses déplacements en Inde puis en Roumanie.
Réduit de quatre jours à 37 heures, son voyage à New Delhi - où le programme préparé de longue date a été sabré par le visiteur - a ainsi profondément déçu et surtout vexé les Indiens, qui, par représailles, n'ont signé aucun contrat, préférant s'adresser à Berlin et à Rome pour la modernisation de ce pays continent, peuplé de 1,2 milliard d'habitants et où tant reste à faire. Et Sarkozy a osé imputer à notre ambassadeur en Inde, M. Bonnefond, la responsabilité de cet échec !
PAS DE MINISTRE MAIS LE PÈRE DE LA MARIÉE
Même fiasco à Bucarest où le président. qui devait rester deux jours, a passé quatre heures à peine, au motif qu'il était très pris par la préparation de la présidence française de l'Union européenne ... au second semestre ! Un prétexte qui n'a évidemment trompé personne. Et qui a été d'autant plus mal pris par les Roumains, naturellement susceptibles, qu'une méfiance séculaire les dresse contre les Hongrois - ce qu'est pour eux Sarkôzy, au moins par le nom.
Preuve d'ailleurs qu'il n'attachait aucune importance à cette escale, il ne s'était fait accompagner que de six personnes, dont un seul ministre ou plutôt un simple secrétaire d'Etat (aux Affaires européennes), Jean-Pierre Jouyet.
En revanche, et cela a plongé dans la stupéfaction aussi bien les dirigeants roumains que les journalistes français, le président était escorté de l'Italo-Brésilien Maurizio Rommert, le père biologique de sa nouvelle épouse Carla Bruni Tedeschi, dont il a exigé la présence lors des cérémonies et sur les photos officielles.
Le Turinois Rommert aurait-il des racines roumano-bessarabiennes comme Aron Chouganov alias Ciganer, le défunt père de Cécilia ? Ce magnat du BTP carioca avait-il convaincu son gendre de l' introduire auprès des décideurs économiques roumains ?
Si tel était le cas, on aurait préféré que le chef de l'Etat roulât pour la France plutôt que pour son beau-père. Et l'on espère surtout que la prochaine fois qu'il se déplacera à l'étranger, il mettra plus de cœur à défendre le pays qui l'a élu après avoir accueilli et naturalisé ses parents.
Jacques LANGLOIS. Rivarol du 15 février 2008

samedi 6 septembre 2008

Sarkozy, valet de la Maison-Blanche


L'installation d'une base militaire française permanente aux Émirats arabes unis traduit l'alignement de la diplomatie française sur la « pax americana » imposée par la Maison-Blanche au Proche-Orient.
Officiellement et selon le ministre de la Défense Hervé Morin, l'accord conclu par Nicolas Sarkozy et les autorités émiraties va offrir à la France une position stratégique sur le détroit d'Ormuz à quelques kilomètres des côtes iraniennes.
Dans la chasse gardée américaine qu'est devenue cette région du monde, tout accord à vocation militaire ne peut être obtenu sans l'aval de la Maison-Blanche. La base interarmées permanente, qui devrait compter 400 à 500 hommes et être opérationnelle courant 2009, servira avant tout les intérêts géostratégiques américains et notamment la surveillance du détroit d'Ormuz, par lequel transite la majeure partie du trafic pétrolier mondial.
C'est une implication supplémentaire et dangereuse de la diplomatie française dans la stratégie de tension menée par les États-Unis à l'encontre de l'Iran.
L'accord signé par Nicolas Sarkozy s'inscrit dans une politique plus large d'alignement désormais systématique de la politique étrangère française sur la diplomatie américaine. Il fait en effet suite au déplacement, fin août 2007, du ministre socialiste des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, à Bagdad, chaudement salué par Washington, aux velléités de rapprochement avec l'Otan, et au revirement du président français sur le dossier afghan. En effet, alors candidat, Nicolas Sarkozy avait déclaré que les soldats français n'avaient pas vocation à rester indéfiniment en Afghanistan, avant de se raviser une fois élu, en avalisant le redéploiement des avions militaires français dans le Sud afghan, en renforçant la présence militaire française sur le terrain, et en affirmant mi-novembre que la France « restera engagée militairement en Afghanistan aussi longtemps qu'il le faudra ».
Mais c'est bien sur le dossier iranien que la diplomatie française a définitivement abandonné toute indépendance de vue. Fin septembre, Bernard Kouchner évoquait la possibilité d'un conflit avec la puissance persane alors même que le directeur général de l'énergie atomique (AIEA), Mohammed Elbaradei, réaffirmait que la menace nucléaire iranienne était surévaluée et qu'il n'y avait pas de « danger clair concernant le programme nucléaire iranien ».
Des propos ignorés par Nicolas Sarkozy qui, emboîtant le pas à Washington et à Israël, appelait en octobre à l'adoption de « sanctions croissantes contre l'Iran ».
Si la menace n'est pas réelle, comme l'a confirmé le 3 décembre un rapport des services de renseignements américains relevant (tout comme ce fut le cas en Irak) « l'absence de preuves concrètes d'un programme de fabrication d'armes nucléaires, sur la base des inspections », la marche vers la guerre n'en continue pas moins. Avec la complicité de la diplomatie sarkozienne.
Éric Domard Français d'Abord ! janvier 2008

lundi 1 septembre 2008

Sarko, la tactique et la stratégie

On ne peut rester que confondu devant le contraste entre l’habileté tactique brillante de Sarkozy et son vide stratégique abyssal, presque par refus de la pensée stratégique. Cela correspond à l’air du temps, privilégiant, jusqu’à l’éradication complète, le « people » sur l’homme politique et l’action sur la pensée. Le cas Sarkozy est encore éclairé lors de la visite de G.W. Bush à Paris, vendredi dernier, à la lumière notamment d’un commentaire du « Times », du 14 juin. Le commentaire, qui ne manque ni de lucidité ni d’une certaine amertume, constate par conséquent la perte d’influence des Britanniques auprès des USA.
Quelques mots du « Times »…
« Le Président Bush a annoncé une “nouvelle ère d’unité transatlantique” à son arrivée en France hier, le lieu de son discours étant tout aussi significatif que son contenu. En choisissant Paris pour ce que les fonctionnaires de la Maison-Blanche ont appelé « la pièce maîtresse » pour faire ses adieux à l’issue de sa longue semaine de visite en Europe, M. Bush a cherché à sceller une spectaculaire transformation intervenue dans les relations avec la France depuis que le président Sarkozy a été élu l’année dernière. »
« La Grande-Bretagne qui, pendant si longtemps, a fait office de pont, parfois branlant, au-dessus de l’Atlantique, n’a plus une telle importance stratégique et diplomatique. Le président Bush passe deux nuits à Paris, mais seulement une à Londres demain – où il dînera en privé avec Gordon Brown après avoir vu la Reine. Une grande partie de son passage en Grande-Bretagne sera consacré à la question relativement locale de l’Irlande du Nord avant de regagner Washington. »
Alors que le premier ministre a tenu à prendre ses distances avec le président américain – l’ambassade britannique à Washington, par exemple, fonctionnant selon des strictes consignes de maintien de profil bas – le président français a délibérément revêtu le manteau porté autrefois par Tony Blair, avec une attitude de défi – même triomphante – ne retenant pas ses mots pour dire son engouement pour tout ce qui est américain. Hier, un diplomate américain a qualifié M. Sarkozy « d’axe autour duquel tourneront nos relations avec l’Europe », ajoutant que son « penchant pour l’action plutôt que pour la réflexion » convenait au caractère propre de M. Bush ».
Le reste du commentaire est une longue ballade admirative sur le brio de Sarkozy, réussissant à se placer et à s’imposer comme « meilleur ami de Washington », évidemment au détriment des Britanniques. Tom Baldwin et Charles Bremner, les deux auteurs de l’article, vont jusqu’à mettre en évidence l’aisance avec laquelle Sarkozy parle avec dureté aux Américains sur certains sujets, sans s’attirer la moindre rebuffade :
« En effet, M. Sarkozy a dit sans ménagement à M. Bush qu'il devait s’engager davantage sur la question du changement climatique, tout comme il a été sévèrement critique à l’égard de la politique commerciale américaine et de ce qu'il considère comme une dévaluation délibérée du dollar de la part de Washington. Le lien entre les deux leaders est si fort que la Maison-Blanche considèrent de telles attitudes comme des défis plutôt qu'une source de division. »
Tout cela décrit une tactique remarquablement conduite de la part du président français, une tactique basée sur des méthodes que comprennent les experts américanistes. Beaucoup d’exclamations, d’affirmations éclatantes, concernant des choses simples exposées par des appréciations en forme de slogans. Les deux auteurs citent un diplomate américain qui leur a confié que Sarkozy va devenir « l’axe autour duquel tourneront nos relations avec l’Europe », qui explique que son « penchant pour l’action plutôt que pour la réflexion » se marie parfaitement avec le caractère de M. Bush. Certes, et l’on peut aussi observer, pendant qu’on y est, qu’il y a parfois des compliments dont on se passerait bien…
Pas Sarkozy, sans nul doute. La description de son entregent et de son habileté dans ses relations avec l’actuel président des Etats-Unis rend compte d’un sens tactique aigu et d’une grande capacité d’exploitation de la technique des communications, de la technique « people » de préférence aux arguments politiques, de l’exclamation à défaut d’explication. La nuance ne l’embarrasse pas. Lorsqu’il s’exclame, à propos de l’Afghanistan, qu’il faut se battre jusqu’à la victoire finale car on ne doit pas céder aux « tortionnaires » (« We cannot give in to torturers »), on ne peut qu’approuver tout en se demandant de qui il parle – puisque certaines bonnes âmes pourraient aussitôt penser à Guantanamo, aux vols de la CIA et à quelques prisons fameuses d’Afghanistan. Parvenir à se faire passer pour le grand « meilleur allié » de Washington en Afghanistan alors que les Britanniques portent, aux côtés des forces américaines, la charge principale de cette guerre désastreuse, a de quoi rendre bien amers les susdits Britanniques.
Reste la question principale : où mène tout ce brio tactique ? La politique française semble réduite à des visions stratégiques complètement enfermées dans des soucis tactiques adaptés au court terme, aux moyens plutôt qu’aux fins. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de pensée, chose encombrante et inutile dans ces temps qui filent vite, donc il n'y a pas de stratégie originelle. Le retour de la France dans l’OTAN, qui semble maintenant inéluctable, est un bon exemple d’une stratégie guidée par une tactique et enfantée par la tactique (sinon l'effet), sans autre substance que l’exclamation de la chose en soi présentée comme une idée féconde. La seule explication de substance est que la décision tactique porte en elle sa vertu stratégique, ce qui laisse rêveur lorsqu’on voit l’état de l’OTAN alors que la dialectique française présente l’Organisation comme une sorte de Saint-Graal. Annoncer qu’on restera en Afghanistan jusqu’à la victoire finale n’explique pas pour autant dans quel but l’on s’y trouve et comment se fera cette victoire finale. L’enfermement dans un maximalisme anti-iranien permet de beaux discours et de belles formules mais fait s’interroger sur l’intérêt de la chose, surtout si Obama arrive à la présidence bien décidé à entamer un dialogue constructif avec Téhéran (le sénateur républicain Hagel, qui pourrait tenir une place importante dans l’équipe Obama, a affiché récemment en public et sans crainte d’être démenti sa certitude que « si Obama est élu, c’est la voie qu’il suivra avec les Iraniens »). Les Européens, et les Français en premier parmi eux, vont se retrouver marginalisés dans leur maximalisme, le jeu se déroulant alors à trois : l’Iran, les Etats-Unis et la Russie, qui s’imposeront comme les partenaires nécessaires en raison de leur poids auprès de l’Iran. (La Russie exactement dans le rôle qu'auraient dû tenir les Européens s'ils avaient suivi leur politique naturelle.)
Tout est à l’avenant dans la politique française vis-à-vis des Etats-Unis, comme dans la politique française générale d’ailleurs. L’absence de nuances renvoie sans doute à l’humeur indiscutablement pro-américaniste du président français, y compris lorsqu’il critique la position américaine (« Qui aime bien châtie bien »). On ne peut tout de même écarter le fait que cette efficacité et ce brio s’exercent à l’égard d’un président (des Etats-Unis) qui n’existe plus, et qui ne peut que bondir de joie lorsqu’il rencontre enfin, en Europe, un chef d’Etat qui le prend encore au sérieux ; et à propos d’une politique américaine qui n’est qu’un résidu catastrophique des sept années épuisantes depuis 9/11, dont plus personne ne sait que faire. Que Sarkozy prenne ceci et cela tant au sérieux est habile pour le (très) court terme, mais au-delà ?
Finalement, Sarkozy agit comme s’il était son propre premier ministre – ce qui est d’ailleurs sa marque de fabrique dans toutes les affaires depuis qu’il est président – occupé à traiter avec brio, toujours ce brio de circonstance, des affaires courantes et immédiates, tandis que, derrière lui et un peu au-dessus de lui, le vrai président penserait aux choses sérieuses, notamment pour le cas qui nous occupe, à l’après-GW, à une éventuelle nouvelle grande politique, avec les Etats-Unis ou pas, et ainsi de suite. La grande question est donc : Y a-t-il un président qui pense derrière et un peu au-dessus du premier ministre Sarkozy ?
L’intérêt de cette affaire, on le trouvera effectivement lorsque le premier ministre Sarkozy se tournera pour consulter le président. Cela aura lieu dans six mois, dans un an, cela aura lieu lorsque le partenaire américaniste, s’il n’est pas emporté dans quelque tourmente et lorsqu’il se sera débarrassé de G.W. Bush, de ses ors et de ses séquelles, se dira qu’un « meilleur ami » du calibre de la France mérite qu’on lui demande des services précis, des engagements et toute cette sorte de choses – comme il avait l’habitude de le demander aux Britanniques.
Rubrique : Bloc-Notes
http://www.dedefensa.org/article.php?art_id=5202 17/06/08
Traduction des extraits de l’article du « Times » par RS
Correspondance Polémia 25/06/08