lundi 25 juin 2007

Pleins pouvoirs au sarkozysme

Nicolas Sarkozy détient tous les pouvoirs.

On se souvient de la fameuse phrase d'André Malraux :
" Entre les communistes et nous, il n'y a rien ", qui signifiait principalement, comme l'a fort justement analysé Paul-Marie Coûteaux, que, lorsque l'auteur de La Condition humaine énonça cette formule, " toute politique qui ne se [fondait] sur aucune de ces traditions ne [pouvait] résister aux lames de fond de la puissance, l'armée allemande naguère comme aujourd'hui les féodalités financières ", étant entendu - et sur ce point Coûteaux sera sans doute d'un avis divergent - que le " gaullisme " était alors compris dans une acception très large qui l'ancrait dans une tradition dont la pratique politique l'éloigna maintes fois.
Force est de constater aujourd'hui qu'il n'y a même plus cette alternative, car il n'y a plus d'alternative du tout. Il y a le sarkozysme, et puis rien. Plus rien en face, ni à côté, rien en miroir ni en parallèle. Rien qui réunisse la puissance politique et la fermeté doctrinale, Rien non plus, ou quasiment rien, qui fasse contrepoids ni correspondance idéologique. Rien qui permette le débat, ni l'affrontement autre que stérile, politicien, revanchard. Or ce pathétique néant est lourd de menaces. Car ce néant fait face à tout.
Le sarkozysme dispose des pleins pouvoirs pour se propager dans toutes les strates de la société.
Qu'est-ce, au fait, que le sarkozysme ?
Excellente question à laquelle personne d'honnête ne peut apporter de réponse franche, hormis celle-ci: le pouvoir d'un homme, qui n'a jamais rien voulu d'autre que d'accéder à ce pouvoir, mais dont nul ne sait ce qu'il veut en faire, hormis l'utiliser pour sa propre gloire et le conserver aussi longtemps qu'il le pourra dix ans au moins.

Le sarkozysme est-il d'essence nationale?

C'est peu probable, Est-il pour autant un avatar du conservatisme ou du néo-conservatisme américain ? Le soupçon est lourd mais on ne peut en être certain. Est-il un libéral-populisme? Le ministre de l'Economie qu'il fut nous a donné au contraire des exemples d'interventions colbertistes que ses prédécesseurs, même socialistes, n'auraient pas osé mener. Alors? Alors, à partir de maintenant, on va savoir, et aucune excuse ne sera recevable pour nous expliquer qu'il n'a pas eu les moyens de mettre en œuvre la politique de redressement qu'il jugeait d'une impérieuse nécessité pour la France, ni qu'il n'avait pas les recettes pour résoudre tous les maux dont souffrent la France et les Français puisqu'il a passé des années à convaincre que lui seul était en mesure de redresser la France.


Les pouvoirs dont dispose Nicolas Sarkozy sont évidemment ceux que lui confère la Constitution de la Ve République, mais la pratique qu'il en a déjà montre à quel point nous sommes entrés dans l'ère d'un pouvoir personnel, où toutes les décisions se prennent à l'Elysée, où c'est moins que jamais le gouvernement qui " détermine et conduit la politique de la nation ", où le premier ministre a moins de puissance que le directeur de cabinet du chef de l'Etat et où les ministres n'ont aucune autonomie sauf à être remerciés par le big boss si, d'aventure, il leur vient à l'idée de prendre une initiative malheureuse.

Le Sénat lui est acquis, l'Assemblée nationale aussi, dans des conditions assez extravagantes. Il se trouve en effet que la très grande majorité des députés de l'UMP qui ont été élus sont des députés sortants, qui, sans l'élection de Nicolas Sarkozy, auraient à coup sûr perdu leur mandat, balayés par la colère populaire, la plupart n'ayant jamais eu le courage depuis qu'ils siègent sur les bancs de l'Assemblée de proposer les réformes sur lesquelles le nouveau chef de l'Etat a été élu ! La majorité dont Nicolas Sarkozy va disposer est la même que celle qui a légiféré sous Jacques Chirac, suscitant l'insatisfaction que l'on sait ! Les députés vont donc devoir faire demain ce qu'ils n'ont pas osé ou voulu faire hier, Et ils seront contraints de le faire, car aucun d'entre eux n'ignore à qui il doit sa réélection.

Aucun îlot de résistance ne s'étant manifesté par ailleurs parmi les puissances d'argent qui peuvent être nuisibles à l'intérêt général quand elles sentent des menaces peser sur leurs intérêts, ni dans le prétendu contre-pouvoir médiatique qui n'est pas connu pour ses tendances suicidaires, Nicolas Sarkozy est en position de totale domination sur le pays.
Cela a beaucoup d'avantages (pour lui). Cela a aussi un inconvénient (toujours pour lui) : car cela veut dire qu'il est en situation de pleine et entière responsabilité. Nicolas Sarkozy s'est défini comme de droite.
Il a affirmé sa volonté d'en finir avec l'esprit de Mai '68.
Il a remis, durant toute sa campagne électorale, le mot France à l'honneur dans chacun de ses discours.
Il a promis de nous redonner la fierté d'être Français.
Il nous a garanti le plein emploi sous cinq ans,
Il nous a assuré du retour de la prospérité. Les Français l'ont cru.

On attend.

Jean-Marie Molitor L e Choc du Mois.


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