vendredi 4 mai 2007

Les petits et grands secrets corses de Nicolas Sarközy

Les petits et grands secrets corses de Nicolas Sarközy

Jul 7, 2003
Auteur : L'investigateur

Christophe Deloire et Christophe Dubois ont conclu leur livre « L’enquête sabotée » sur le Sarközy corse.

En effet, celui-ci a épousé en première noces, Marie-Dominique Culioli, fille des pharmaciens de Vico. Ses deux fils sont donc à moitié corse et issu d’une micro région toute proche de Cargèse. Mieux, lorsque l’un de ses fils expriment le désir de revenir en Corse et de suivre un stage chez un berger c’est dans la région de Cargèse qu’il est placé. Quelques temps après, le mouvement nationaliste ne bruisse plus que d’une rumeur. Le jeune Sarkozy-Culioli aurait été « contaminé » par le virus autonomiste au contact de son chef de stage, un nationaliste pur sucre.

L’information parvient aux Renseignements généraux qui la font remonter. Nicolas Sarközy prend alors des mesures. Il ne serait pas bon pour sa carrière que la moitié de son enfant, la moitié Culioli, prenne un jour la cagoule ou tout au moins se balade avec le cagoulard autour du cou.

Selon les deux auteurs, Sarkozy pourrait même avoir un moment corsiser son nom en remplaçant le "y" par un "i", ce en quoi il se trompait. Au XIXe siècle de bons bourgeois corses qui refusaient leur corsitude transformèrent le "i" de leur nom en "y". Ainsi Paul Valéry descend-il de la famille des Valerii. Plus en arrière, tout Neuilly raconte comment le jeune Nicolas fut pris en main par Achille Peretti, l’indétrônable maire de Neuilly qui venait l’accueillir à l’école. De là daterait cet amour pour la Corse qui le poussa dans les bras d’une Culioli.

Comme Janus, Nicolas Sarkozy, justement, a deux visages. Le premier est celui d'un ministre ambitieux. L'ancien maire de Neuilly revêt ce masque quand il s'assied sous les ors de la République pour travailler à ses dossiers.
Un jour, le passager de la place Beauvau pose pour Paris Match en parodiant, avec sa famille, le fameux cliché des Kennedy dans le bureau ovale de la Maison-Blanche. John-John jouait sous la table de son père. Le petit Louis s'installe à la même place sous le bureau de Cambacérès. Pour la photo, l'épouse de Sarkozy, Cécilia, s'incline sur l'épaule de son mari, à la manière de Jacky. Il ne manque même pas le chien, Indy. Question décoration, le ministre a accroché au mur des peintures modernes de Honegger, pour remplacer des « affreuses baigneuses du XVIIIe siècle ». Dans ses rares moments d'oisiveté, Sarközy rêve qu'il traverse la rue et pousse les grilles de l'Élysée. L'incarcération de Colonna peut précisément l'aider à réaliser ce dessein.

L'autre Sarközy s'épanouit en Corse. C'est celui d'un amoureux de l'île de Colomba et de Mateo Falcone. Car le ministre est familier des lieux pour avoir épousé en premières noces une pharmacienne originaire du village de Vico. Où est Vico ? Sur les hauteurs de Cargèse ! Pendant des années, le jeune homme qui avait pris la succession du Corse Achille Peretti à la mairie de Neuilly a passé là ses vacances.

Gustave Flaubert a visité la région en 1840 et vante les mérites du village : « À Vico on commence à connaître ce que c'est qu'un village de la Corse. Situé sur un monticule, dans une grande vallée, il est dominé de tous les côtés par des montagnes qui l'entourent en entonnoir.» L'auteur de Madame Bovary s'enchante pour les légendes des lieux : « Vico est la patrie du fameux Théodore dont le nom retentit encore dans toute la Corse avec un éclat héroïque ; il a tenu douze ans le maquis et n'a été tué qu'en trahison. C'était un simple paysan du pays, que tous aimaient et que tous aiment encore. »

À propos de l'île, le ministre de l'Intérieur aime à paraphraser la phrase de De Gaulle s'en allant vers l'Orient compliqué avec des idées simples. Il a appris cette leçon à Vico. Il s'est initié aux figatellu et au brocciu, deux spécialités corses. Ces connaissances culinaires et ces attaches sensibles permettront à l'avocat, une fois ministre, de faire de grandes déclarations d'amour à la Corse lors de ses discours officiels. Depuis, Sarkozy a divorcé de son épouse corse et s'est remarié avec Cécilia en octobre 1996. Mais il n'a pas tout à fait divorcé de cette terre attirante et violente à la fois. D'autant que ses deux fils, Pierre et Jean, nés de son premier mariage, se sentent corses et passent toutes leurs vacances sur l'île.

Nicolas Sarközy a beaucoup fréquenté la villa des Culioli à Sagone, en bordure de mer. Dans cette petite ville qui s'étire le long de la mer, il a aimé jouer au tennis, faire du bateau et profiter de la plage. Il y a conservé des attaches. Il suffit de compulser l'annuaire téléphonique d'années récentes pour s'en convaincre. En 1999, à l'adresse de la villa baptisée Ros'hen, apparaît un certain Nicolas Sarkozi (sic), joignable à un numéro aujourd'hui erroné. Le maire de Neuilly avait-il eu la préciosité de « corsiser » son nom de famille hongrois, ou France Télécom a-t-elle commis une erreur ? En tout cas, Sarkozi est bien Sarkozy.

Avant qu'il n'intègre le gouvernement Raffarin, il n'y avait pas de protection particulière autour de la bâtisse cossue, coincée entre la mer et la route départementale d'Ajaccio à Cargèse. Depuis, un haut mur de parpaings a été édifié pour « sécuriser » les lieux. En face de la maison Ros'hen, il y a toujours eu et il y a encore le glacier, propriété d'André Geronimi. Notable local, Geronimi fut maire adjoint. Proche du RPR, il aimait deviser avec celui qui n'était encore que le juvénile maire de Neuilly.

Le 12 septembre 1983, le glacier de Sagone est victime d'un « paquet », un attentat à l'explosif. L'action n'a jamais été revendiquée. Deux jours après l'explosion, les gendarmes sont mis sur une piste par un renseignement anonyme. En substance: « Allez fouiller chez les Colonna. » La maréchaussée effectue une perquisition dans la propriété. Les militaires extirpent du puits un petit arsenal.

L'actualité réserve des surprises. Dans la nuit du 10 au 11 septembre 2002, un bruit sourd réveille André Geronimi. Un nouveau « paquet » a endommagé son établissement. Neuf ans après le premier « avertissement ». Deux cents grammes d'explosif posés contre la porte du bar. Seule la moitié de la charge a explosé. Les dégâts sont minimes. Deux jours plus tard, la foule se presse chez le glacier. C'est une soirée de soutien aux « prisonniers politiques », en faveur des membres du commando Erignac. Plusieurs membres présumés, dont Yvan Colonna, sont originaires de la région. Une centaine de personnes participent à cette soirée musicale. Tous les proches du fugitif, considéré comme un « martyr » de la cause, partagent un verre.

Cachés en face, contre la villa Ros'hen, les agents des RG ont une vue dégagée sur le glacier. Ils relèvent les plaques d'immatriculation et notent scrupuleusement les noms des participants à cette étonnante party. Lorsque le rapport parvient sur son bureau, le ministre n'a aucun mal à imaginer les lieux. Il ironise d'ailleurs sur les fonctionnaires qui, ignorant sa parfaite connaissance du terrain, lui donnent des leçons sur le microcosme local. Il se souvient avec précision du restaurant A Stonda, à l'entrée de Sagone. Tenu autrefois par la soeur d'Yvan Colonna, cet établissement où le ministre a des souvenirs a été repris par un militant nationaliste. Ami du fugitif, Jean-Thomas Campinchi connaît le ban et l'arrière-ban de la mouvance autonomiste dans la région. Il est proche de plusieurs membres du commando Erignac.

Le 25 octobre, le ministre se rend en Corse dans le cadre des assises des libertés locales. Dans le Falcon de la République qui le transporte, se trouvent ses collaborateurs et l'un de ses fils, venu passer les vacances de la Toussaint chez ses grands-parents maternels. Le lendemain matin de son arrivée, Nicolas Sarközy convoque les hauts responsables de la police et de la gendarmerie corses, notamment le patron du SRPJ, le commandant de la Légion de la gendarmerie et le directeur de la sécurité publique. La veille, un attentat a été commis contre une agence bancaire d'Ajaccio, à proximité de la préfecture, où dormait le ministre. Celui-ci se montre furieux. L'ambiance du petit-déjeuner est glaciale. Pas un invité n'ose toucher aux croissants. Mais un autre sujet préoccupe Sarközy. Les deux enfants de son premier lit sont-ils en sécurité dans le « triangle des Bermudes » ?

À Cargèse, Vico ou Sagone, le FLNC a toujours montré sa poigne. Il est difficile de répondre. Les invités au petit-déjeuner regardent leurs chaussures. Finalement, l'un d'eux se lance : « Les Corses ne touchent pas aux enfants. » « Ils n'aiment pas ceux qui ont peur », pense le ministre en son for intérieur. L'un des deux fils du ministre de l'Intérieur passera une semaine tranquille à Vico. L'été, il a déjà fait un stage de berger à quelques encablures de la bergerie d'Yvan Colonna. Les nationalistes ont bien rigolé.

Nicolas Sarközy connaît le concubin de Christine Colonna, Pierre Geronimi, le fils du glacier de Sagone. Passionné de football, Geronimi a rencontré Yvan sur les terrains de sport et l'a accompagné en 1995 dans une grande virée en Amérique latine.

D'ailleurs, les deux fils du ministre ont déjà joué au football avec Colonna. Le berger organisait de petits tournois estivaux dans le cadre de l'Association sportive cargésienne. Les enfants Sarközy s'essayaient au ballon rond avec celui qui serait un jour l'assassin présumé du préfet de Corse. Bien entendu, ils n'ont plus revu Colonna depuis son départ en cavale.

Un épisode de l'été 2002 a fait jaser dans un cercle restreint. « On » a vu l'un des deux adolescents circuler dans la voiture de Christine Colonna, réputée nationaliste fervente. Le beau-frère d'Yvan la lui avait prêtée. À l'arrière de l'automobile était fixé un autocollant du Ribellu, le symbole du FLNC. Les Renseignements généraux planquaient dans le coin, pour débusquer l'homme invisible et surveiller la progéniture remuante du ministre. Remontée au plus haut niveau du ministère, l'information a créé une petite gêne.
Le monde est parfois trop petit. Le ministre laisse faire ses enfants comme ils l'entendent, mais prend soin pour lui-même d'éviter tout contact avec la famille Colonna. « Quand Jean-Hugues Colonna a tenté de prendre attache avec moi fin 2002, par l'intermédiaire d'un directeur du ministère, j'ai refusé catégoriquement », révèle Sarkozy. Le ministre sait que l'État a déjà beaucoup perdu dans cette affaire, et n'a pas voulu prendre le risque de se faire piéger. Le fugitif doit tomber dans un guet-apens des policiers et pas l'inverse.


L'Investigateur.

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